UBS MARBLE : SDGNT/SDBH

C’est un problème bien connu des exégètes : les gloses proposées dans les dictionnaires de grec ou d’hébreu/araméen bibliques sont un pis-aller. D’une langue à l’autre, les « mailles » ne correspondent pas nécessairement et l’usage des gloses est de ce fait problématique à bien des égards : Lee, A History of New Testament Lexicography (2003) l’a bien montré pour le NT, et c’est bien entendu valable pour l’AT. Pour pallier à cette insuffisance, le seul moyen est de produire un réel dictionnaire : c’est-à-dire un ouvrage proposant des définitions plutôt que des équivalents de traduction plus ou moins contestables.

   Louw et Nida, en pionniers, ont publié le fameux Greek-English Lexicon of the New Testament based on semantic domains (1988), qui a été la première tentative en ce sens. Ce n’est pas l’alpha et l’oméga des dictionnaires de grec biblique, mais son approche va dans le bon sens et est restée pratiquement sans équivalent. On ne peut guère mentionner que deux initiatives comparables, mais de moindre ampleur : le Dictionnaire grec français du Nouveau Testament (2016, 2e éd.) de Cochrane (bien plus modeste), et une série de fascicules parus sous la houlette de l’Université de Cordóba et dirigés par J. Mateos et J. Peláez, Diccionario Griego-Espanol del Nuevo Testamento (2002 ss) (en cours et bien loin d’être terminé). Les auteurs ont l’ambition de proposer une méthode scientifique d’analyse sémantique ; ils l’ont décrite dans deux ouvrages, qui ont été traduits en anglais et réunis dans le volume New Testament Lexicography (2018). C’est une méthode assez sophistiquée, et ingénieuse, qui a un mérite notoire : sortir de l’approximatif et de l’arbitraire. Pour l’hébreu, la seule initiative en ce sens est celle initiée en 2000 et dirigée par de Blois, Semantic Dictionary of Biblical Hebrew.

   Pour l’hébreu on connaissait donc le Semantic Dictionary of Biblical Hebrew (SDBH) depuis quelques temps déjà, puisque l’UBS l’avait mis en ligne, le mettant à jour au fur et à mesure de sa progression. Or voilà qu’un projet dit MARBLE, Modular Aggregation of Resources on the Bible, a eu la bonne idée d’y adjoindre le Louw-Nida (sous l’appellation : Semantic Dictionary of the Greek New Testament, SDGNT), en profitant de l’occasion pour moderniser significativement l’interface, et, oh bonheur, d’en livrer une version française relativement bien aboutie !

Le SDGNT se consulte soit directement depuis le texte biblique du Nouveau Testament, soit depuis un encart dédié. On remarquera avec joie que l’interface propose en fait le texte grec de l’UBS4 ainsi que le texte français de la NBS lemmatisés. Un survol du curseur sur le texte grec ou français déclenche la surbrillance (en rouge) du terme grec/français parallèle. La lemmatisation est de bonne qualité et n’est pas fondée sur les numéros Strong comme trop souvent, mais bien sur les lemmes.

Le NT se parcourt par chapitres, et l’outil propose parfois de visualiser des images en lien avec le passage en cours. Par exemple en Eph 3.1 il est possible de consulter un visuel en rapport avec l’apôtre Paul.

Cette fonctionnalité n’est pas sans rappeler l’ouvrage édité par l’UBS, R. Pritz, The Works of Their Hands – Man-made Things in the Bible (2009) qui vise à munir les traducteurs d’informations pratiques sur les realia des temps bibliques. Outil à ne pas négliger !

Il est aussi possible de consulter le SDGNT directement. Pour cela il faut passer par l’onglet Rechercher, puis saisir le mot grec en Unicode.

Et là, merveille ! Il s’agit d’une définition du Louw-Nida, en français. On peut alors cliquer sur le domaine principal ou le sous-domaine (ici « Musical Instruments » qui n’est pas traduit) pour explorer les différents termes d’un même champ sémantique. La recherche directement par domaines sémantiques ne semble pas fonctionner en français, mais elle est disponible en anglais.

C’est le même principe qu’avec le SDGNT ; l’outil propose en plus l’analyse morphologique.

Cet outil extrêmement réjouissant n’est hélas pas complet. Lorsqu’une entrée manque, seule l’analyse morphologique est fournie. Le système de surbrillance permet aller de déterminer un sens de base.

Le texte biblique est de même relié à des visuels.

C’est aussi le cas du Dictionnaire lui-même, par ex. pour les termes גמל et קב.

On ne peut que souhaiter longue vie et prospérité à cet outil extraordinaire. Il constitue pour moi la substantifique moelle de ce que doit être une consultation biblique profitable : une connexion directe entre le sens lexical des termes et les realia qu’ils désignent.

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