09/09/2014

Le livre d’Esther, un conte de fée ?

Esther

Malgré des données solidement fondées dans l’Histoire (topographie du palais de Suse, protocole perse, existence de Mardochée…), de nombreux historiens contestent la valeur historique du livre d’Esther. Ainsi ce qu’on peut lire dans l’Introduction à la Bible, I (A. Robert et A. Feuillet dir., 2e éd., pp.690-692) :

On inclinerait assez volontiers dans le sens d’une histoire objective si l’on se contentait d’observer l’exactitude de certains détails : distinction de la citadelle et de la ville (3, 15, suggérée en 8, 14 et 9, 6. 11), de la résidence royale et des harems (2, 13.14) ; caractère impulsif et sensuel du monarque (I, 11-12; 2, I. 1 ; 3, 10; 6, 1-10; 7, 8-10; 8, 7-12; 9, 11-14), attestée par l’histoire; intolérance d’Aman, qui n’était pas de race perse (3, 1); moeurs administratives des Achéménides (1, 13-21); irrévocabilité des décrets royaux (1, 19; 8, 8 ; cf. ii). Mais un récit fictif peut, tout aussi bien qu’un ouvrage d’histoire, présenter des traits qui s’apparentent au réel. C’est l’inverse qui ne saurait se produire. Or, dans le livre d’Esther, il y a de nombreux traits invraisemblables. (…) Ces indices défavorables à l’historicité du livre d’Esther orientent la pensée vers une interprétation du récit dans le cadre d’un genre littéraire plus en rapport avec sa physionomie. (…) Autant d’indices permettant de situer le livre d’Esther dans la catégorie des midrashim de type haggadique, sans lui refuser pour autant la valeur évocatrice d’une ambiance historique dont il apparaît comme un des plus authentiques témoignages.

On trouve la même idée exprimée dans diverses autres introductions populaires (ex. A. Robert et A. Tricot, Initiation Biblique, Desclée, 3e éd., 1954, pp.142-143). Mais est-ce vraiment le cas ? Le récit du livre d’Esther n’est-il qu’un récit visant à expliquer la fête des Pourim, ou à exalter le nationalisme juif ?

Gérard Gertoux vient de livrer sur le livre d’Esther une nouvelle enquête historique passionnante : The Book of Esther : is it a fairy-tale or history ?

On y découvre de solides arguments pour identifier Esther à Amestris, dater et synchroniser des événements marquants du récit (comme la conspiration contre Xerxès survenue en avril -484, et ce, conformément au récit biblique), et réfuter, magistralement je trouve, cette suspicion pseudo-scientifique entourant Esther.

Je profite de l’occasion pour signaler le film sorti en 2010, One Night with the King (Esther, reine de Perse), qui est tout fait sympathique.